Augmente-nous la foi
6 octobre 2019

Augmente-nous la foi

Prédicateur:
Passage: Luc 17:5-10
Type De Service:

Chers frères et sœurs,

Pour entrer pleinement dans cette demande des apôtres, pour comprendre ce qui l’a motivée, il faut lire les 4 versets qui ouvrent Luc 17, lorsque Jésus parle aux disciples au sujet des scandales et du pardon, pour leur apprendre à veiller sur eux-mêmes et à veiller sur les autres. Jésus dit aux disciples que les scandales/ les occasions de chute/ les pièges/ les obstacles qui font trébucher doivent arriver, c’est inévitable, parce que c’est le combat de la foi. Mais il vaut mieux ne pas être celui par qui le scandale arrive, il vaut mieux ne pas être l’instrument de la chute de son prochain, il faut être extrêmement vigilant à ne pas être celui/celle qui fait tomber les autres dans le péché... « Prenez garde à vous-même » dit Jésus... (Luc 17, 3). L’avertissement est très sérieux :

« Ne faites pas tomber les autres, dit le Seigneur, ce n’est pas sans conséquence pour votre paix intérieure, pour votre vie spirituelle et votre vie tout court… et s’il arrive qu’un frère/une sœur vous offense, vous lui pardonnerez autant de fois qu’il le faudra (vous n’allez pas dire : je pardonne pour cette fois, mais pas la suivante...). Attention aux fautes que vous pouvez commettre et qui pourraient faire tomber les plus petits dans la foi, attention à ne pas vous faire piéger vous-mêmes, parce que vous refusez de pardonner, et l’offense que le prochain vous a faites devient un obstacle gigantesque qui vous fait trébucher sur le chemin... »

Les apôtres écoutent la parole de Jésus, ils prennent au sérieux la mise en garde du Seigneur qui les invite à la vigilance en disant : « Prenez garde à vous-même », et il semble que ça provoque chez eux une prise de conscience : certes, ils croient en Dieu, ils aiment Jésus et sont ses disciples, mais ils ne voient pas comment ils pourraient réussir à le suivre sans trébucher ou faire trébucher les autres, si Lui-même ne vient pas fortifier leur foi… Le Seigneur a dit que les occasions de chute sont inévitables, c’est-à-dire on est tous appelés à faire l’expérience de la chute, on est tous exposés au péché, et on est tous potentiellement source de scandale les uns pour les autres, et les apôtres se sentent totalement démunis face à cette situation. C’est l’apôtre Paul qui disait : « Je ne sais pas ce que je fais, j’ai la volonté de faire le bien, mais je n’y arrive pas… je ne fais pas le bien que je veux, et je fais le mal que je ne veux pas… » (Romains 7, 15-19) alors qui peut être infaillible au point de ne jamais tomber dans le pécher ou faire pécher son prochain ? Qui peut être parfait dans son amour pour Dieu et pour son prochain, au point de ne jamais scandaliser et pardonner toujours ? Personne, pas même ceux qui ont marché avec le Seigneur, pas même les apôtres qui se tournent vers Jésus et lui adressent cette prière : « Augmente-nous la foi. »

« Augmente-nous la foi. » Le mot que nos Bibles traduisent par augmente/ajoute, c’est un mot construit sur la racine du verbe titémi (τίθημι) qui signifie en grec placer, déposer à l'intérieur de, mettre en dépôt (dans le sens de confier aux bons soins d'une personne, comme dans la parabole des mines le propriétaire confie à chaque serviteur un certain nombre de pièces d'or à fructifier (c’est le même verbe titémi qui est employé).

Ce verbe, titémi (τίθημι), se traduit aussi par fixer, conserver, garder, par exemple lorsque Jésus annonce sa mort aux disciples, Il leur dit : « Retenez/gardez bien ce que je vous dis maintenant : le Fils de l'homme va être livré entre les mains des hommes. » (Luc 9, 44).

Et ce verbe titémi est utilisé avec un préfixe de mouvement très important, pros, qui pourrait se traduire par en présence de/ tourné vers. Donc, lorsque les disciples disent à Jésus : « Augmente-nous la foi », on peut entendre qu’il s’agit de placer, fixer, garder la foi en eux, de façon à ce qu’ils restent tournés vers Dieu, de façon à ce qu’ils restent dans la présence de Dieu… Ce verbe titémi est tellement riche de sens qu'il donne à la prière des disciples une intensité particulière. Ce verbe ne signifie pas que les apôtres ont constaté leur peu de foi et en demandent un peu plus, comme une bouteille d'eau qui se vide qu'on doit remplir à nouveau, comme si les apôtres possédaient déjà en eux la foi et qu’il ne restait plus qu’à la booster un peu de temps en temps, lorsque la flamme diminue un peu. Si on suit le sens premier de ce verbe titémi (τίθημι) qui est employé plusieurs fois par l’évangéliste Luc, les apôtres disent à Jésus : ‘Place en nous la foi, dépose en nous la foi…’ Ils ne disent pas : ‘Augmente-nous la foi’, comme si elle y était déjà, mais les apôtres demandent à Jésus de mettre en eux la foi, comme s’ils ne l’avaient pas… Et la réponse de Jésus va effectivement dans le sens que les disciples n’ont pas la foi, puisqu’Il leur répond : « Si vous aviez de la foi comme un grain de moutarde… » Donc vous n’avez pas la foi, vous ne l’avez même pas petite comme un grain de moutarde…

Et c’est aux apôtres que Jésus dit ça, c’est-à-dire au Douze… Ce sont les apôtres qui reconnaissent qu’ils n’ont pas la foi, qui reconnaissent qu’ils ont besoin que Jésus mette en eux la foi…

Les apôtres. Ce n’est pas le disciple lambda qui écoute occasionnellement l’enseignement de Jésus et puis retourne à son travail et à ses occupations, non, ce sont les apôtres, ceux que Jésus a envoyés (apôtre en grec signifie envoyé), donc ceux qui sont envoyés par Jésus reconnaissent qu’ils n’ont pas la foi…  Ils marchent avec Lui depuis un moment, ils ont vécu des expériences inoubliables avec le Seigneur qui pourraient nous conforter dans l’idée qu’ils ont la foi maintenant, ils font confiance au Seigneur et lui obéissent… et les voilà, totalement désarmés, qui prient pour demander la foi… Ils sont censés avoir la foi pour aller en mission au nom du Christ, pour témoigner au cœur du monde… NOUS sommes censés avoir la foi… La foi à l’épreuve du quotidien, à l’épreuve de la dure réalité de la vie des hommes…

Mais, tout comme les apôtres, on est bien obligé de reconnaître parfois qu’on est en panne de confiance en Dieu… On croit que Dieu existe, mais on doute de Lui dans certaines circonstances. On doute même tellement fort qu’il nous arrive de croire que Dieu nous oublie ou qu’Il nous veut du mal : ‘Qu’est-ce que j’ai fait, Seigneur, pour mériter ça ? Seigneur, si tu m’aimes, pourquoi ne mets-tu pas fin à mon tourment ? Où es-tu quand tous ces malheurs arrivent dans le monde ?’ Où es-tu, Seigneur, quand la maladie nous arrache ceux que nous aimons ?’  Notre foi est confrontée à ces questions, et nous pouvons nous sentir comme desséchés par les revers de l’existence, brisés par un coup trop dur, anéantis par une épreuve trop difficile à surmonter… On est tellement laminé à l’intérieur que notre confiance en Dieu est perdue. Pendant un moment, on se demande si on a encore la foi, on n’est plus sûr de rien du tout, on entre même en révolte contre Dieu parce qu’on en peut plus...

Les apôtres/les disciples avant nous ont fait cette expérience de la foi qui peut nous manquer, alors même que nous croyons en Dieu… C’est très bizarre comme situation : on croit que Dieu existe, et dans le même temps, notre foi/confiance en Lui est sérieusement entamée par des situations particulières… C’est une tension/contradiction dans notre vie spirituelle que le texte de ce matin fait ressortir à travers la demande des apôtres : « Augmente-nous la foi. » Les apôtres croient, ils ont tout lâché pour Jésus, mais ils avouent manquer de foi, et Jésus dans sa réponse leur fait comprendre qu’effectivement ce manque de foi est préjudiciable pour le croyant, car il se trouve ainsi privé de ce qui fait sa force…

Le Seigneur dit aux apôtres : « Si vous aviez de la foi comme un grain de moutarde, vous diriez à ce mûrier : Déracine-toi, et plante-toi dans la mer, et il vous obéirait. » Vous savez comme c’est dur de déraciner un arbre et comme c’est impossible de le planter dans la mer ! Vous vous imaginez en train de planter des pommiers dans la Manche ou dans la Méditerranée ?!? Sachant que la mer pour les Hébreux symbolise le lieu où sont les forces du chaos, les puissances du mal (le Léviathan, la bête qui monte de la mer…), la mer symbolise l’adversité, la mort… ‘Si vous aviez la foi, dit Jésus, vous pourriez ordonner aux puissances du chaos et avoir le dessus sur l’adversaire…’  Si vous aviez la foi, vous trouveriez la force de faire face à l’adversité, même celle qui vous semble insurmontable, vous auriez la force de tenir debout au milieu du chaos, dans les situations de trouble absolu, c’est l’image de l’arbre planté au milieu de la mer… Si vous aviez la foi, ne fût-ce qu’un tout petit peu, vous auriez force et pouvoir pour mener les combats de la vie, vous ne seriez pas ballotés/malmenés par les incertitudes liées au lendemain, vous seriez tranquilles/calmes dans la tempête, dormant paisiblement au milieu de la mer la plus déchaînée, parce que vous avez confiance en Dieu… Évidemment, on ne va pas devenir des faiseurs de miracles, comme on voit faire les super héros dans les séries télévisées, mais par la foi, les forces nous seront insufflées pour vivre et lutter en ce monde, pour résister au péché, pour pardonner, pour ne pas trébucher ni faire trébucher autrui…

 

Avoir la foi, c’est une force, une grande force, dit Jésus… Manquer de foi ou perdre la foi, c’est se retrouver sans forces, désarmé dans l’adversité… Jésus ne cherche pas à culpabiliser les apôtres avec ça, Il ne leur dit pas : ‘Vous manquez de foi, vous ne serez pas sauvés !’ Jésus répond à la prière des apôtres en leur montrant en quoi la foi fait leur force. Et d’un autre côté, l’évangile souligne que le croyant est souvent pris dans cette tension/contradiction qui consiste à croire en Dieu et… à manquer de foi… Les Douze croient et manquent de foi, et le témoignage des évangiles nous est donné pour nous faire comprendre que tout croyant, y compris les apôtres et même les super apôtres comme dira Paul (2 Corinthiens 11, 5), tout croyant est confronté à cette contradiction croire-manquer de foi…. C’est pourquoi nous sommes invités à exercer notre discernement sur les situations, les réflexions, les pensées qui peuvent conduire à un manque de foi, et donc à un affaiblissement spirituel/intérieur, par conséquent on va manquer de force dans la bataille… Au lieu de déraciner les arbres et de les planter dans la mer comme dit Jésus, c’est nous qui risquons d’être déracinés et jetés à la mer, en d’autres termes, c’est nous qui risquons d’être submergés/dominés/noyés par les problèmes auxquels nous sommes confrontés dans notre quotidien, parce que la foi, la force qui vient de Dieu nous manque…

 

Et à quoi servent des envoyés qui n’ont pas la foi ? Parfois, on a un peu l’orgueil de se prendre pour les fidèles dépositaires de la foi, ceux qui la détiennent et qui en ont le cœur rempli, ceux qui ont la foi transportée par cargo tellement il y en a… Mais le Seigneur connaît nos cœurs, Il sait quand nous lui faisons confiance et quand nous doutons… À quoi sommes-nous utiles au Seigneur si, malgré notre baptême et nos engagements d’église, nous sommes quelque part dans la posture des incrédules, manquant totalement de confiance en lui ? Nous doutons de son amour, de sa bonté qui agit dans le monde, nous doutons du salut qu’Il nous donne en Jésus-Christ, nous contestons avec Lui, nous vivons dans la peur, avec des questions certes légitimes, mais aussi des blessures qui nous ont tellement marqués qu’on ne sait plus que penser de Dieu… Cœurs rebelles, souvent désobéissants, cœurs qui doutent au lieu de faire confiance…

 

À quoi servons-nous dans cet état ? À rien, c’est l’histoire des serviteurs inutiles qui nous choque tant parce que c’est dur de s’entendre dire qu’on est bon à rien… Pourtant, quelle bonne nouvelle est proclamée ici, dans cette parabole des serviteurs inutiles qui fait suite à la prière des apôtres ! Jésus redit dans la parabole la grâce infinie de Dieu qui prend pour serviteurs des bons à rien qui manquent de foi ! Quelle grâce le Seigneur nous a faite en nous appelant à son service, c’est-à-dire en nous déclarant UTILES pour le royaume, alors que nous ne le sommes pas… Pécheurs invétérés, pierres de scandale sur le chemin de nos semblables, frères ennemis dont les divisions sont des contre-témoignages regrettables qui ne servent pas du tout la cause de l’évangile…

 

La bonne nouvelle de Jésus-Christ nous remet à notre juste place d’enfants de Dieu qui est de recevoir dans l’humilité le don de Dieu : nous étions des bons à rien, et le Seigneur a fait de nous ses serviteurs, Il nous a élevés à la dignité de serviteurs dans sa maison… Vous connaissez le cantique 14/10, Agneau de Dieu, Agneau vainqueur ? Il rejoint cette idée de que Jésus a fait de nous, misérables pécheurs bons à rien, des serviteurs et même des rois au service de Dieu. Chantons ce cantique :

 

Agneau de Dieu, Agneau vainqueur, / Tu pris sur toi notre misère,

Et tu nous fis, pour Dieu ton Père, / Et rois et sacrificateurs.

Ensemble aussi nous te rendons / Honneur, gloire et magnificence,

Force, pouvoir, obéissance, / Et dans nos cœurs nous t’adorons.

Amen, amen, Seigneur, amen !

 

Oui, je crois que nous pouvons faire nôtre la prière des apôtres : « Augmente-nous la foi ». Car ils ont compris que toute notre vie est un don et une grâce de Dieu, et que sans le Christ, nous ne pouvons pas avoir la foi nécessaire pour marcher avec Dieu.

 

Conclusion :

C’est le Seigneur qui suscite la foi en nos cœurs, par son Esprit, c’est Lui qui la fortifie, la ranime quand la flamme vient à baisser… C’est en Lui, Christ Jésus, que nos vies de pécheurs inutiles deviennent, comme l’écrit Paul à Timothée, des vases d'honneur, rendus saints, remplis d’espérance et de joie, des vases utiles au Maître et propre à toute bonne œuvre... (2 Timothée 2, 21)

Amen.

Pasteure Ruth-Annie Coyault, le 6 octobre 2019.

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