La Question du Mal – Oct 2018
Mettre Dieu dans la question : restitution des discussions du Groupe « Aux Sources de la Foi » lors de la rencontre du 9 octobre 2018 – Autour du 1er chapitre (p14-44) du livre d’Adolphe Gesché intitulé « Le Mal »
Face à la question du mal il y a trois grandes attitudes.
La première et la plus universelle consiste à s’en prendre à Dieu. Elle constitue le socle sur lequel s’ancre l’athéisme.
Dieu est le responsable direct et indirect du mal, qu’il n’aurait pu ou voulu empêcher. Le reproche adressé au christianisme est de ne pas entendre suffisamment le cri de la souffrance. Le scandale du mal qui frappe l’innocent doit être pris en compte.
Dire que Dieu est tout puissant, qu’il est bon et en même temps constater que le mal existe semble contradictoire.
Cet athéisme manifeste cependant, à sa façon, une dénonciation du mal, tout en révélant finalement une haute idée de Dieu : s’il existait, il serait bon.
C’est plus un cri contre le mal que contre Dieu. L’objection porte donc sur la nature de Dieu plus que sur son existence.
La deuxième manière d’aborder le problème, c’est de prendre la défense de Dieu. C’est le discours des croyants. C’est ce que l’on entend en parlant de théodicée. On plaide la cause de Dieu.et, pour l’innocenter, on affirme qu’il ne peut être responsable du mal, ni dans son origine, ni dans son maintien, sauf à introduire le principe de « permission » du mal en vue de sauvegarder la liberté de l’homme.
D’autres arguments ont été avancés. La thèse de la mise à l’épreuve pour notre bien, à l’exemple de Job, est très fréquemment avancée. Autre explication : nous ne sommes que des créatures, donc imparfaites par nature, si nous étions parfaits nous serions Dieu nous-mêmes, ce qui n’est pas possible. Autre position encore, plus philosophique, le mal n’a pas d’être, il n’est que l’absence du bien.
Ces défenses de Dieu ont quelques faiblesses. Leur plus grande faiblesse, c’est de ne pas rejoindre le cri de l’homme en souffrance. Elles effacent, d’entrée de jeu, le scandale du mal. C’est ce qui les rend inopérantes. A vouloir trop innocenter Dieu, on finit par l’expulser du problème
Ces deux premières positions laissent donc la question du mal en déshérence de Dieu. Trop préoccupé de Dieu, on s’interroge moins sur le mal et sur ses conséquences sur la vie des hommes.
Mais pour le chrétien, Dieu ne peut ni ne veut être écarté de la question du mal. C’est même exactement là qu’il convient de le situer : mettre Dieu dans la question
Les thèmes bibliques liés au salut l’attestent en abondance. Dieu dans son combat contre le mal offre un salut. « Dieu n’est pas cause du mal, mais il en a fait sa cause. » Dieu est du même côté que nous, face au mal, nous avons donc le droit et le pouvoir de nous tourner vers lui pour demander son secours et pour lui dire notre souffrance. Nous découvrons alors que c’est lui-même qui pose la question du mal et qu’il y répond. La bible nous montre un Dieu scandalisé par le mal. Elle parle de combat contre le mal. C’est un tout autre univers. Dieu n’est pas passif, mais actif, adversaire du mal.
Il est là devant quelque chose qui n’appartient pas à son plan et qu’il importe de combattre comme une adversité avec laquelle il n’y a pas à composer. Le mal est tellement mal qu’il ne peut trouver l’ombre d’une justification.
La réponse de l’Ecriture est formelle : ce mal, qui a surpris toute la création, ne doit laisser place à aucune compromission et doit être aussitôt combattu. Dieu se présente donc comme celui qui est avec l’homme dans ce combat. Autrement dit, l’homme découvre ainsi que le combat qu’il mène contre le mal, est aussi celui de Dieu. Ainsi le cri de l’homme est légitime, il rejoint la propre clameur de Dieu.
Nous retrouvons, là, un thème de l’évangéliste Jean, celui de la priorité. Dieu, premier concerné en toute chose, donc aussi dans la question du mal.
« Dieu n’est pas cause du mal, mais il en a fait sa cause. »
Premier touché, il s’empare de cette question, il la fait sienne pour lui apporter la seule vraie réponse. C’est lui, avant tout autre, qui se lève, pour annoncer le salut mystérieux révélé en Christ.
Ce n’est plus le mal qui est une objection contre Dieu, mais bien plutôt Dieu qui devient l’objection du mal. C’est dire exactement ceci : C’est mon combat que Dieu mène et c’est le combat de Dieu que je mène. Dieu est avec l’homme dans une même adversité et dans une même lutte contre un ennemi commun.
C’est un tout autre Dieu que l’on découvre ici. Celui qui prend le parti des victimes, que nous sommes, se faisant « victime » lui-même et mettant sa puissance à ce service. Quel Dieu autre !
Certes le problème du surgissement du mal n’est pas résolu. Le mystère du mal reste sans réponse.
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